La taxe dite GAFA (acronyme pour Google, Amazon, Facebook et Apple) semble vouloir trouver un consensus au niveau international. Le G7 de Biarritz a été le signe de cette convergence de vues. Explications.
En février 2019, après des mois de négociations, l’Union Européenne avait fait face à un échec. L’instauration d’une taxe sur les services numériques n’a pas abouti. En droit européen, les réformes fiscales doivent se voter à l’unanimité. Et les pays du Nord ont fait bloc contre l’Irlande, la Suède et le Danemark à leur tête.
C’est alors un revers pour la France qui s’était fortement impliquée sur le dossier. Mais le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, ne souhaite pas mettre fin à la bataille politique. Il rédige donc un texte national qui reprend les grandes lignes du projet européen. Et ce avec une taxation de 3% du chiffre d’affaires numérique réalisé en France par entreprises entrant dans l’assiette de la taxe. Au total, c’est une trentaine d’entreprises qui entreraient dans le champ de la taxe française. La recette fiscale espérée est de 400 millions d’euros puis 600 millions d’ici 2021.
Mais ce texte, critiqué dans le secteur numérique aurait une vocation temporaire. Le ministre promet qu’il deviendra caduc quand les négociations à l’OCDE auront abouti. Dans ce cadre, le dernier G7 tenu à Biarritz a été l’occasion de dégager des pistes sérieuses. En particulier concernant la relation franco-américaine. Face aux désaccords de façade entre Donald Trump et Emmanuel Macron, un point de sortie s’est dégagé.
La voie de l’OCDE privilégiée
Un accord bilatéral a ainsi été signé entre la France et les Etats-Unis. Il contient deux volets majeurs. Tout d’abord, la France s’engager à mettre de côté sa propre loi nationale, dite Taxe sur les services numériques (TSN) lorsqu’un accord sera trouvé au niveau de l’OCDE. Et ce, dès son adoption (avant toute ratification). Le second point porte sur les montants de la taxe payés en 2019. Un crédit d’impôts sera accordé aux entreprises sur le reliquat de trop perçu. Et ce dans l’éventualité ou la taxation française est supérieure à la taxation internationale.
Les Etats-Unis ont ainsi approuvé la voie de l’OCDE. Ils redoutent en effet une multiplication des lois nationales. A défaut, Ursula von der Leyen, la nouvelle présidente de la Commission européenne, se chargera d’éditer des règles communautaires (en chargeant Margrethe Vestager et son chargé du dossier Paolo Gentiloni). Ainsi, le groupe de travail France/USA/OCDE devra dégager une position commune en l’absence d’accord fin 2020.
Le projet de loi poursuit son chemin législatif
Le projet de loi a été voté en lecture définitive en juin avec des modifications lors du processus législatif. Suivant le Gouvernement dans sa politique ainsi que Joël Giraud, rapporteur au texte (Hautes-Alpes, Lrem), l’hémicycle a enrichi le texte d’exemptions. Il a précisé le champ d’application de la taxe. Des compléments ont aussi été votés visant les modalités de paiement de la taxe. Notamment en cas de retard dans son versement ou encore sur les obligations de justifications des entreprises à la demande de l’administration fiscale.
Le Sénat a poursuivi le travail législatif en mai avec Albéric de Montgolfier comme rapporteur (Eure-et-Loire, LR). Contrairement à l’avis du Gouvernement, les sénateurs ont fixé une date limite dans l’application du texte qui prendra fin en 2021. Ils ont permis la déductibilité de la taxe de la C3S. A noter que la taxe est par ailleurs déductible de l’impôt sur les sociétés. Ils ont également donné aux entreprises un délai complémentaire pour le paiement de la taxe. L’idée est qu’elles puissent s’organiser. Ils ont par ailleurs souhaité obliger le Gouvernement à rendre un rapport annuel sur l’état d’avancement des négociations à l’OCDE.
La France est « en retard » selon Bruno Le Maire
Du côté du Sénat, la commission d’enquête sur la souveraineté numérique a permis à Bruno Le Maire de dresser un constat. Il estime que France est en retard sur le volet numérique. En particulier au regard de ses concurrents américains et chinois. Pour rattraper cet écart, il milite pour une réforme de la fiscalité internationale. Cette dernière doit, selon se termes, suivre le sens de l’histoire. Le ministre de l’Economie souhaite que la fiscalité prenne mieux en considération la valeur immatérielle des données et des brevets, dans un contexte où les profits sont à présent mondialement dématérialisés.
Olivier Robillart