L’évolution de la société et des systèmes de santé entraînent des conséquences majeures. Parmi les enjeux du numérique en santé figurent l’essor des préoccupations liées à la santé mentale, l’utilisation de l’intelligence artificielle dans un contexte de santé populationnelle. Explications de ces tendances prospectives.
La santé mentale figure parmi les préoccupations majeures des personnes. Selon des chiffres avancés par l’OMS, 1 Européen sur 4 est touché par des troubles psychiques au cours de sa vie. En France, 7,5 % des Français âgés de 15 à 85 ans ont déjà souffert de dépression au cours des 12 derniers mois. Aussi, le coût économique et social des troubles psychiques est évalué à 109 milliards d’euros par an.
Cette cause majeure peut trouver des réponses grâce au numérique. Ce volet joue un rôle paradoxal quand bien même la technologie joue un rôle que l’on peut qualifier de globalement positif. En matière de santé mentale, son développement a également contribué à l’apparition de certains maux dans la société. Le constat est donc double, notamment du fait que les outils numériques captent régulièrement l’attention des utilisateurs.
Vincent Bouton, Directeur Général de Petit BamBou, explique : « Le numérique aide à résoudre un certain nombre de problèmes en matière de santé. Les médecins l’utilisent pour aider les personnes à se recentrer sur eux-mêmes. Cet outil technologique permet de reconquérir cette attention même si on ne se considère pas comme une solution magique mais un outil qui permet d’aller mieux. Dans les entreprises, proposer nos outils n’est pas la seule solution en soi pour se sentir mieux. Mais un être humain qui va mieux est se sentira en meilleure situation dans sa propre entreprise. En somme, le rôle de l’entreprise est d’aider les personnes à se réapproprier leur travail. Notre limite est de rappeler que nous ne sommes pas un outil magique. »
Santé mentale : une recrudescence des arrêts de travail
Le constat est, à ce titre, évident. En entreprises, on constate une explosion des problèmes liés à la santé mentale avec une recrudescence des arrêts de travail. Selon des chiffres de l’OMS en 2019, la dépression et l’anxiété représente 12 milliards de jours de travail perdus à l’échelle de la planète.
Vincent Bouton ajoute : « Nous avons créé une offre BtoB pour accompagner les entreprises et valoriser les bonnes pratiques. Le sociétés sont à présent sensibilisées sur le sujet car cela permet de renforcer leur marque employeur. Mais la France a encore beaucoup à faire dans ce domaine. De nombreuses entreprises américaines ou britanniques disposent déjà de services 24/7 dédiés à la prise en charge de ces enjeux. En France, le sujet commence à évoluer avec des réflexions autour de la mise en avant du sujet comme grande cause nationale 2025. Les entreprises commencent à mettre en place des outils pour améliorer le bien-être. Mais cela ne fait pas forcement diminuer le stress. »
L’intelligence artificielle, au cœur des innovations
L’utilisation de l’intelligence artificielle par les professionnels du numérique en santé figure, sans conteste, parmi les tendances lourdes du secteur. Récemment, de nombreuses entreprises ont levé des fonds dans l’optique de développer destinés à utiliser la technologie au sein d’outils et services dédiés à la santé.
Le secteur est donc en essor. Certaines entreprises choisissent d’appliquer la technologie à l’analyse de la voix des patients et des professionnels. Par exemple, Better World collecte des verbatims textuels et vocaux (web, baromètres sociaux, forums, e-satis, questionnaires internes, FEI, réclamations…) afin de les classifier et d’établir une analyse des sentiments (positifs et négatifs). Dans une logique d’amélioration de la QVT, ces éléments permettent de construire de nouveaux plans d’actions afin d’apporter des solutions aux points négatifs.
Daniel Ritter, Président co-fondateur de Better World, entreprise spécialisée dans l’utilisation de l’intelligence artificielle pour l’analyse de textes confirme la tendance. En 2017, le responsable est parti du constat selon lequel les établissements de santé disposaient d’une importante quantité de données trop peu utliisées comme le feed-back des patients.
Il explique : « Il y a entre 3 et 10 000 textes libres disponibles pour un même établissement. La tâche d’analyse de ces éléments est fastidieuse mais l’IA joue à plein grâce au NLP (Natural Language Processing). Le but n’est pas seulement d’améliorer l’efficacité des hôpitaux mais de mettre en avant les points de progression soulignés par les patients. La sortie de l’hôpital par exemple est souvent perçu comme un élément anxiogène. Un plan d’action imaginable revient alors à revoir le process de sortie afin de mieux expliquer la teneure des ordonnances distribuées aux patients. »
Améliorer l’expérience des soignants
Daniel Ritter ajoute : « Du côté des directeurs de qualité, le besoin est criant. Il ont conscience qu’il est important d’apporter des réponses concrets. L’IA n’est peut-être pas toujours la bonne réponse car cela dépend de la maturité des équipes. En somme, les cas d’usage ne sont jamais évident mais c’est à nous qu’il revient d’expliquer en quoi l’IA peut aider pour travailler plus efficacement. »
En somme, la technologie permet également d’améliorer l’expérience des soignants. Mesurer celle des patients permet d’établir une meilleure relation entre les praticiens et les personnes dont ils ont la charge. Avec une charge administrative amoindrie, les professionnels disposeront alors d’une meilleure écoute.
La santé populationnelle, avenir du système de santé
Les experts s’accordent sur un même point. La manière dont les professionnels et le public utiliseront la santé inclura de plus en plus d’éléments numériques. Un mouvement majeur sous-tendu par le fait que la santé populationnelle préfigurera les organisations de demain. Ce paradigme signifie qu’une attention toute particulière sera portée sur la prévention des maladies. En somme, le numérique deviendra incontournable en devenant un support de cette stratégie populationnelle
Pour que le numérique en santé se développe, il est nécessaire qu’une filière industrielle forte puisse se constituer. Celle-ci peut alors nourrir un écosystème entier, de développer des leviers de croissance nouveaux. Mais également répondre aux attentes de la commande publique. Une vision partagée par nombre de professionnels et experts du numérique en santé. A tel point que ces derniers développent la conviction selon laquelle cette véritable filière industrielle a vocation à prendre toute sa place d’ici l’horizon 2030 au travers notamment d’innovations et de mouvements forts tels que le virage domiciliaire, l’hospitalisation à domicile (et plus largement les services à domicile) ou bien encore la télésurveillance médicale.
Une valeur réelle
Qu’il s’agisse de dispositifs médicaux connectés, de logiciels et ERP dédiés ou bien encore de mise à disposition d’outils et de services numériques, chacune de ces briques apporte une valeur réelle et probante au secteur. Cette valeur intrinsèque est porteuse à bien des égards pour la filière de la santé.
A titre d’exemple, Ramsay Santé investit chaque année environ 200 millions d’euros dans ses établissements. Ces fonds sont dirigés vers de nouvelles technologies chirurgicales, d’imagerie, de construction et de modernisation d’établissements… Il innove aussi au service des patients avec de nouveaux outils numériques.
L’entreprise conduit une réflexion sur la mise en place d’un outil de chatGPT. Celui-ci est mis à disposition des nouveaux arrivants, pour leur simplifier l’onboarding et la recherche de documents. Autre point, des expérimentations visant à moderniser la numérisation de la santé mentale sont conduites. Elles servent à conserver un lien fort lorsque le patient rentre à son domicile.
Pour aller plus loin. Consultez le livre blanc de Numeum « La santé en 2030 sera numérique » portant sur les perspectives de développement du numérique en santé. Le document est librement téléchargeable à cette adresse : Livre blanc Santé Numérique 2030.
Olivier Robillart