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Obsolescence logicielle : les éditeurs bientôt soumis à une obligation d information ?

Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie solidaire est discuté au Parlement. Un texte qui introduit le concept de lutte contre l’obsolescence logicielle. Certains points mis en avant peuvent apporter une meilleure compréhension de la technologie au sens large. D’autres effets de bords sont à craindre. Explications.

Les pouvoirs publics s’interrogent actuellement sur l’éventualité d’instaurer de nouvelles obligations envers les éditeurs de logiciels et de systèmes d’exploitation. L’idée sous-tendue par l’article 4 quater (D) du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie solidaire est d’instaurer envers les éditeurs une sorte d‘instaurer un dispositif d’information du consommateur sur la compatibilité des mises à jour de logiciels. Un vendeur devrait alors fournir des informations quant aux mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du bien. Le consommateur pourra refuser d’effectuer ces mises à jour mais les vendeurs devront leur indiquer les conséquences de ce refus.

Il aurait vocation à s’appliquer « pendant une période à laquelle le consommateur peut raisonnablement s’attendre (minimum de 2 ans) et il sera possible d’aller au-delà selon les produits, dans les conditions prévues par décret ». Elle vise principalement les modèles destinés au grand public.

On est donc loin de la proposition de garantie logicielle initialement introduite au Sénat. La mesure adoptée, aux contours inappropriés au marché actuel, imposait de nouvelles fonctionnalités aux fabricants de l’ensemble des appareils électroniques en ces termes. Ils auraient dû « proposer à leurs clients des mises à jour correctives du système d’exploitation utilisé par leurs appareils compatibles avec tous les modèles de leur gamme jusqu’à dix ans après leur mise sur le marché ». Une telle mise à jour devant alors être adaptée à la puissance et aux capacités de stockage des appareils.

La nouvelle rédaction choisie par la chambre basse va dans le sens d’un devoir d’information. Il propose une meilleure compréhension des logiques techniques qui sous-tendent les politiques de mises à jour de programmes informatiques.

Des propositions sur l’obsolescence logicielle aux ressorts complexes

Certaines organisations ont milité pour introduire le concept d’obsolescence logicielle. C’est le cas par exemple de HOP (Halte à l’obsolescence programmée) laquelle produit régulièrement des documents sur le sujet du matériel. Et ce, en partenariat avec des entreprises de réparation d’équipements électroniques.

Concernant le volet Software, l’organisation décrit l’obsolescence logicielle sous plusieurs techniques. Elle évoque : « l’obsolescence perçue via une campagne marketing visant à rendre indispensable la nouvelle version du logiciel et totalement has been l’ancienne. Mais aussi par la limitation de la durée de support technique par rapport à la durée d’utilisation réelle ou encore l’incompatibilité de format entre ancienne et nouvelle version du logiciel ».

Le principe est de constituer une sorte de label pour ce type de service en mesurant leur empreinte à savoir la quantité de mémoire vive ou la puissance du processeur requise. L’objectif est de pousser les éditeurs à « optimiser leurs logiciels. Ils seraient alors incités à allonger la durée de vie des équipements sur lesquels ils s’exécutent ». HOP propose également une ouverture du code source (open source) afin de valoriser les logiciels qui ne sont plus supportés. Les propositions de l’organisme vont dans le sens d’une fin des formats propriétaires. Il milite aussi pour une standardisation de ces derniers.

Vers la constitution d’un label ?

Des positions certes intéressantes. Il n’en demeure pas moins qu’elles manquent de prendre en compte de nombreux aspects du développement du logiciel. Une large ouverture de ces programmes revient à limiter la spécificité de chaque programme. En gommant notamment la valeur ajoutée qu’il apporte à l’utilisateur. En outre, l’ensemble des logiciels proposés sont le fruit de travaux de R&D souvent longs et coûteux. Il est donc important de ne pas réduire les logiciels à de simples programmes finis. Mais plutôt de les concevoir comme l’aboutissement d’une chaîne de valeur dans laquelle interviennent des ingénieurs, développeurs et autres équipes marketing-commerciales.

Ainsi, les amendements présentés aux députés proposent de renforcer l’information et les droits des consommateurs concernant les mises à jour de logiciels. Ces dernières devant être qualifiées de nécessaires au maintien de la conformité du bien. Le consommateur peut alors refuser ces mises à jour.

De son côté, le vendeur aurait obligation de fournir au consommateur des mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du bien. Cette obligation court pendant une période à laquelle le consommateur peut raisonnablement s’attendre (minimum de 2 ans).

Aussi, les élus ont entrepris d’opérer une différenciation entre les mises à jour de sécurité ou correctives de celles destinées au confort de l’utilisateur (ou à l’évolution de l’OS). Des amendements ont été adoptés afin d’obliger les fournisseurs de systèmes d’exploitation à opérer de telles distinctions. Le consommateur devrait alors avoir le choix de n’installer que celles qu’il désire.

Des obligations aux contours flous

De nouvelles obligations dont les contours et les conséquences seraient difficiles à cerner pour les éditeurs de logiciels et les constructeurs. D’autant que nombre d’entre eux font déjà montre de considérations fortes envers ces attentes. Google, par exemple, publie d’ores-et-déjà un ensemble d’informations relatives à sa garantie logicielle à partir du moment où ce dernier n’a pas été retouché ou n’a pas connu de modifications. On pense par exemple aux surcouches logicielles des constructeurs ou des opérateurs.

Aussi, afin de limiter la fragmentation du parc Android, le groupe déploie une garantie de 3 ans sur ses smartphones Pixel. Il s’engage ainsi à pousser toute mise à jour de sécurité sous 18 mois consécutifs à la vente du dernier matériel de la gamme vendu en ligne.

Les pouvoirs publics s’interrogent sur l’obsolescence logicielle

De son côté, le Gouvernement affiche sa satisfaction quant à l’instauration de cette obligation d’information. La Secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson estime que ce texte représente : « des avancées importantes permettant d’aller dans le bon sens ».

Brune Poirson, Secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire

Elle répond aux élus qui insistent sur le besoin que ces appareils ne soient pas rendus obsolètes par des mises à jour successives. C’est pourquoi ils souhaitent qu’un nouveau rapport gouvernemental soit remis. Il doit porter sur « la durée de vie des appareils numériques, l’obsolescence logicielle et ses impacts et les options pour allonger la durée de vie des équipements concernés ». Le rapport devra être présenté 6 mois après la promulgation du texte.

Le logiciel permet de faciliter la réutilisation de matériaux et de lutter contre le gaspillage

Les discussions sur le champ d’application de ces obligations et interdictions relatives à une éventuelle obsolescence logicielle sont floues. Le Parlement n’évoque, en effet pas, le cadre du B2B. Et les contraintes se concentrent davantage sur la partie matérielle, caractérisée par les smartphones et autres tablettes récents.

L’une des approches du logiciel est de mettre fin à certains gaspillages, en particulier dans le secteur du bâtiment. Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie solidaire fait une proposition pour 2022. Les metteurs sur le marché de produits et matériaux de construction devront répondre à deux types d’obligation. Ils devront ainsi contribuer à la gestion de la fin de vie des produits ou matériaux de construction.

Anticiper et prédire grâce au logiciel

Mais cette limitation de la quantité de matériaux utilisés peut être anticipée avant même la construction du bâtiment en question. C’est le cas de Finalcad, qui permet via ses solutions de réduire la consommation de béton nécessaire lors d’un chantier. A l’heure actuelle, nombre de ces éléments peuvent s’avérer incorrectement quantifiés.

C’est pourquoi des systèmes d’analyse prédictive sont à même d’identifier les besoins du secteur de la construction. Une logique indéniablement éco-responsable envisageable que dans la mesure où l’éditeur a consenti à développer ses propres travaux de R&D. Et ce en vue de proposer un logiciel innovant dans une approche Tech for Good évidente.

Olivier Robillart

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