Le salon Vivatech 2024 met en avant l’innovation au travers du numérique en santé et de l’intégration de l’intelligence artificielle. Des tendances majeures dont le développement va se poursuivre dans les prochaines années.
Le premier jour du salon Vivatech 2024 livre une impressionnante démonstration de l’intégration de l’innovation numérique au sein d’applications concrètes. Qu’il s’agisse d’intelligence artificielle, de gestion de la donnée, de mobilité ou de préservation de l’environnement, la technologie se conjugue à des cas concrets. En particulier dans les domaines de la santé, du transport intelligent et de la modélisation des interactions homme-machine.
Au centre des discussions figure logiquement l’intelligence artificielle, et son usage pour quantité d’usages concrets. Il est donc devenu évident que ce type de technologie a un impact sur l’ensemble du marché du travail. Dans ce cadre, le président de la République, Emmanuel Macron annonce que des investissements supplémentaires seront réalisés par l’Etat dans ce domaine.
Selon l’AFP, 400 millions d’euros supplémentaires seront dédiés au financement de la formation de spécialistes de l’intelligence artificielle. Aussi, une série de mesures sont déployées pour favoriser le domaine et son impact à long terme. Le chef de l’Etat entends former pas moins de 100 000 personnes en France, contre 40 000 actuellement. Un enjeu de formation donc, mais également d’acculturation. La somme de 10 millions d’euros est débloquée pour organiser des débats, cafés autour de l’intelligence artificielle.
Ce fonds, soutenu pour un quart par l’Etat, sera lancé avant la fin de l’année. Il doit tout aussi permettre d’accompagner les secteurs les moins bien financés et les plus technologiquement liés à l’IA, les puces électroniques, le cloud…
Quel impact de l’IA sur le quotidien des Français ?
Dans la foulée des annonces étatiques autour de l’intelligence artificielle. Marina Ferrari, secrétaire d’Etat chargée du numérique, développe la vision de l’Etat en la matière. Elle explique : « je suis positive au sujet des développements que permet l’IA. La technologie va modifier la nature de certains emplois mais peu d’entre eux vont réellement disparaitre. Il nous faut donc prendre l’IA comme un challenge plus qu’un problème. Dans les services publics, nous testons une IA baptisée Albert pour que les les agents soient davantage en contact avec le public et développent de meilleures interactions avec le public. En ce sens, l’IA doit être plus inclusive et mieux interagir avec l’humanité. »
La responsable poursuit : « le rôle de l’Etat est d’investir et de créer des structures destinées à développer la technologie. Encourager la formation dans ce domaine est essentiel. Et ce, depuis l’école afin de comprendre ce qu’est réellement l’IA. Il faut donc expliquer à tous les citoyens qu’ils peuvent être acculturés au sujet et ainsi construire une confiance en la matière. »
Les entreprises prêtes pour l’IA ?
Les entreprises du numérique se saisissent de l’opportunité que représentent les IA génératives. Que ce soit pour gagner en productivité, remporter de nouveaux marchés ou faire monter en compétences ses équipes, l’intelligence artificielle présente de sérieux atouts. C’est pourquoi Numeum a récemment publié son livre blanc sur « l’impact de l’IA générative sur les entreprises du numérique. »
Dès lors, nombre d’entreprises proposent des outils destinés aux professionnels afin qu’ils appréhendent dès à présent la technologie. De la finance à l’énergie, en passant par la santé ou la mobilité, de nombreux domaines intègrent la technologie dans une optique d’amélioration de la productivité.
Corine de Bilbao, vice-présidente de Microsoft France explique : « Pour que les entreprises utilisent l’intelligence artificielle, un écosystème local doit déjà être présent, de manière dynamique. Du côté des employés, l’adoption est très forte et les collaborateurs sont de plus en plus nombreux à utiliser l’IA quotidiennement sur des tâches diverses comme le marketing ou le codage. »
Xavier Vasques, vice-président et CTO d’IBM France ajoute : « Nous estimons qu’il est important de ne pas centraliser les choses et d’agir dans une vision qui prend en compte les écosystèmes locaux car chaque pays dispose de différentes valeurs, différentes cultures. Cela nous permet de créer de nouveaux modèles et de les incorporer au moyen de partenariats conséquents avec des entreprises françaises comme Mistral AI. »
Le responsable poursuit : « J’insiste sur le fait que IA ne doit pas uniquement se trouver dans les mains de certaines grandes compagnies. Il faut qu’elle soit également présente dans les mains d’un large panel d’entreprises. Mais également que la population puisse interagir avec l’IA pour, par exemple, dénoncer les fake news. Il existe un véritable projet de société derrière cela. »
De son côté, Eric Schmidt, ex-président et CEO de Google, explique : « Je constate avec joie que l’innovation est présente et très forte dans les entreprises en France. Je qualifierai même ce constat de véritable renaissance en la matière. A date, nous nous rendons compte que se développe une nouvelle forme d’intelligence qui n’est pas humaine et qui génère beaucoup de productivité. Il faut donc à présent aller au-delà dans nos réflexions. Cela est également prégnant d’un point de vue business. Les entreprises phares de l’époque du PC se sont transformé. C’est probablement ce qui arrivera aux entreprises de l’ère Internet. Qui seront les prochains consolidateurs ? c’est désormais la question à se poser. »
L’impact dans le numérique en santé
La santé représente, sans conteste, une secteur dans lequel l’intelligence artificielle permet d’aider les professionnels. Les essais cliniques, par exemple, prennent du temps et demandent de mobiliser de grandes ressources financières (parfois plusieurs milliards d’euros) sur des périodes longues (jusqu’à 12 ans). Un passage obligé lorsqu’il s’agit de trouver et de développer une nouvelle molécule.
Il est dès lors, devenu incontournable de pouvoir numériser ce type d’activité. David Ghesquières, responsable de la numérisation des essais cliniques chez CapGemini Life Sciences, explique : « les technologies comme le jumeau numérique, le patient virtuel permettent d’aller plus loin. Nous tentons d’approcher au plus près de la modélisation des patients. Il faudrait pour cela numériser le comportement biologique et synthétique du corps humain. Nous travaillons à la modélisation des interactions des molécules cancéreuses, des protéines au moyen d’algorithmes. Mais c’est très complexe. Nous disposons de données historiques en vie réelle, d’ordre génétique, sur le style de vie qui, une fois combinées peuvent reconstituer un patient virtuel. Mais cela reste une approche statistique. Il nous est alors possible de créer une cohorte synthétique. »
Traiter des cas rares
Des propos soulignés par le Dr Meriem Koual APHP, chirurgienne en gynécologie. Elle explique : « Pour réaliser des études cliniques, il est nécessaire de recruter des patients. Un fonctionnement des plus complexe lorsque l’on fait face a des cas rares qui ne concernent que 20 personnes en France. Il s’avère alors ardu de disposer d’une cartographie de l’ensemble des cas. La numérisation aide à cela tout comme l’utilisation de données ouvertes. Souvent, les patients atteints de cas rares se rassemblent afin de partager nombre d’informations, d’études cliniques. Ils les montrent alors aux praticiens qui peuvent se trouver démunis face à l’impossibilité d’utiliser certaines données. L’échange peut se faire dans les deux sens mais nous devons aussi de notre côté pouvoir partager davantage d’informations. »
L’utilisation du numérique favorise également le suivi à distance. Cela permet d’éviter que certains patients situés trop loin d’un centre de santé ne soient exclus du suivi. L’utilisation et le partage de la donnée permet alors de faire travailler ensemble le monde hospitalier et la médecine de ville.
Une vision nouvelle de la mobilité intelligente
Parmi les tendances majeures présentée au salon Vivatech 2024, la mobilité intelligente figure comme le volet le plus conséquent de l’innovation. Le consortium Software République dévoile à ce titre, le concept de véhicule connecté destiné au monde de la santé. Baptisé U1st (prononcer you first), l’automobile est le fruit de la collaboration entre Atos, Dassault Systèmes, Orange Business Services, Thales et STMicroelectronics.
Patrice Caine, président et CEO de Thales, explique : « le nouveau concept est développé dans une optique de mobilité intelligente. La Software République propose déjà 10 projets confirmés de ce type et a permis d’incuber 16 start-ups. Mais notre centre de gravité réside véritablement autour de l’innovation et de la possibilité de travailler ensemble d’une manière pragmatique. »
Concrètement, le concept se présente comme un véhicule modulaire. Il peut se rendre dans des déserts médicaux pour proposer une première couche de soins aux personnes dont la santé nécessite un suivi médical.
Aller au plus près des besoins
Carlo d’Asaro Biondo, COO du groupe Atos et CEO d’Eviden, poursuit : « le véhicule permet de prendre les constantes, il connecte en quelque sorte les médecins aux données collectées. Le van peut se rendre partout et servir de centre de santé mobile, délivrer des conseils en prévention et des soins. Il se rend là où les besoins sont. »
Luca de Meo, CEO du groupe Renault, explique : « le concept s’attaque au problème de désertification médicale de certains territoires. En 2026, nous lancerons dont le premier engin électrique conçu comme un centre médical décentralisé. L’idée est véritablement de délivrer des soins là ou il en manque au moyen d’un engin super équipé. »
U1st embarque un système numérique intelligent. Pour le développer, les technologies liées au jumeau numérique ont été utilisées. Philippe Laufer, vice-président exécutif de 3DS Global Brands de Dassault Systèmes, explique : « On se dirige de plus en plus depuis des véhicules en tant que produit vers des véhicules en tant qu’expérience. Le concept de U1st est de tirer le meilleur parti de l’omniverse et de faire travailler ensemble l’industrie, la santé et la mobilité. »
Des propos relayés par Aliette Mousnier Lompré, CEO d’Orange Business. Elle explique : « Tout est désormais devenu un sujet de connectivité mobile. Notre technologie permet de connecter les objets aux véhicules. Le véhicule permet d’analyser le comportement des conducteurs tout en garantissant la sécurité sur la route. Et cela, aussi bien pour lui que pour son environnement. »
Olivier Robillart