Glaze est une jeune pousse qui en l’espace de deux années a réussi le pari de passer le stade de l’éclosion, séduire de nombreux grands comptes et remporter un marché public. Un exercice complexe sur lequel Gwénaël Flatres, co-créateur et PDG de la pépite française, revient pour délivrer son expérience.
Remporter un marché public ou devenir prestataire d’un service public s’avère être un exercice enthousiasmant mais fastidieux pour une entreprise. Au cours d’un processus parfois long et complexe, start-up, PME ou ETI se heurtent généralement à de nombreuses difficultés inhérentes à ce type de contractualisation. Pour une structure réduite, la réussite d’un appel d’offre auprès d’un service public passe inévitablement par un travail profond d’anticipation des besoins.
Proposant son logiciel d’optimisation du parcours client, Gwénaël Flatres, co-fondateur et PDG de Glaze, est parvenu à séduire Pôle Emploi au cours d’un appel d’offre permettant à la start-up de fournir son logiciel SaaS à la plateforme publique. Un véritable tour de force. Son dirigeant nous explique les éléments qui ont permis sa réussite.
Comment se faire connaître, améliorer sa visibilité auprès des services publics ou des grands comptes ?
Une société de grande taille ou un service public sont constamment en recherche de solutions qui répondent à des besoins métiers. Ces mêmes directions ont de plus en plus la main sur les budgets et peuvent prendre des décisions qui ont un impact durable sur leur activité. Nous avons intégré cela rapidement avant de répondre à des appels d’offres pour Pôle Emploi, Engie ou ERDF.
Glaze a rapidement intégré plusieurs accélérateurs (Microsoft, TECH IN France…), noué des échanges avec BNP Paribas et de nombreuses associations professionnelles. Nous y avons rencontré des personnes véritablement en recherche d’innovations.
Quelles sont les 3 étapes majeures à ne pas négliger lorsque l’on répond à un appel d’offre auprès d’un organisme public ?
La première étape est et demeurera naturellement celle des pitchs. Pendant quelques minutes, vous devez convaincre les personnes que vous rencontrez du bien-fondé de votre approche. Il s’agit d’une première entrée en matière qui permet de se faire connaître et reconnaître.
La seconde est, à mon sens, plus critique. Le Proof of Concept (PoC) est le meilleur moyen de démontrer de quoi vous êtes capables. Par contre, j’attire l’attention sur le fait que celui-ci doit être facturé à votre interlocuteur. Un travail non-facturé aura comme effet de faire sortir toute notion de responsabilité de la relation entre les deux parties. C’est sur ce dernier point que la start-up doit concentrer son attention. Facturer un PoC n’a rien de trivial, car il faut comprendre qu’un grand compte et une start-up n’évoluent pas dans la même temporalité. Eux disposent du temps, que vous ne possédez naturellement pas. Nous avons donc opté pour une facturation au temps de travail passé à réaliser le PoC spécifiquement destiné à cet appel d’offre. Vous serez ainsi engagé vis-à-vis de votre futur client, et lui sera plus enclin à s’impliquer dans le projet.
La dernière étape est relative à la différence de taille entre un service public et une start-up en termes de ressources humaines. Vous ne disposez pas de 200 personnes salariées, c’est donc à vous qu’il revient de vous adapter à un mastodonte. Ce dernier point, est le plus important. Seulement 2% des start-up ne franchissent jamais la barrière de la preuve de concept lorsqu’elles répondent à un appel d’offre émanant d’un service public.
Le process est donc lourd voire dangereux pour une start-up face à des mastodontes. Comment ne pas sombrer ?
Les marchés publics constituent, par nature, des ensembles très codifiés. Le wording est particulier, les éléments clés de réussite ne sont propres qu’aux services publics. A cela, il convient de mener de multiples vérifications de due diligence pour qu’une relation de confiance s’établisse. Il est en général difficile « d’y aller seul », de se confronter aux difficultés de tels offres sans faire appel à des conseils, des soutiens qui vous indiqueront la bonne manière de procéder. Pour faire simple, on peut certes remporter un tel concours seul, mais cela sera très compliqué. Vous vous essoufflerez plus rapidement que les autres. Pour donner une image simple, je dirais que vous pourrez certes gagner la Route du Rhum avec un petit bateau, mais ce sera très compliqué.
L’un des moyens de pallier ce problème est de faire appel à un prestataire technique. Un intégrateur comme Cegid, Avanade ou CapGemini représente une bonne porte d’entrée pour ces marchés. Mais là encore, il faut bien comprendre qu’en tant que start-up, vous officierez tel un petit poucet face à des mastodontes dont la puissance en termes de développement et de production est conséquente.
Nous optons également pour une seconde approche qui est d’être référencé auprès d’une centrale d’achat comme l’UGAP (Union des groupements d’achats publics). En 2017, la centrale d’achat public généraliste nationale a reçu 3,2 milliards d’euros de commandes. Cet acteur quasi-incontournable représente indéniablement une clé d’entrée à condition de montrer patte blanche. Il faut généralement plus de 6 mois avant d’y être inscrit, puis d’obtenir une « note de confiance » supérieure à 60 pour être référencé. C’est un travail de longue haleine mais qui finit par payer.
Quelle doit être la compétence première à mettre en avant auprès de vos futurs partenaires ?
Etre capable de s’adapter au rythme d’une structure imposante est une chose. Mais l’argument majeur à mettre en avant est la délivrabilité. Cela doit devenir une obsession qui permettra de ne pas être arrêté lorsqu’il s’agira de passer à l’échelle. Pôle Emploi par exemple totalise 55 millions de visites mensuelles. Il faut donc être en mesure de délivrer le service sans interruption, quelle que soit la taille du public visé.
Sans cette obsession, la start-up risque de rater son objectif. La sanction sera sans appel, le potentiel client ne traitera plus avec vous car il sera frustré de ne pas voir son service s’exécuter. Même si vous êtes prêts avec quelques semaines de retard seulement. Ce sera trop tard.
A ce niveau, bien s’entourer devient critique. Comment avez-vous procédé pour solliciter les bonnes personnes, aux bons moments ?
Les stratégies visant à multiplier les partenariats de référence ne sont en soi pas inintéressantes. Pour sa part, TECH IN France a permis d’entrer en relation avec un écosystème d’acteurs matures et d’échanger avec des interlocuteurs qui ont été présents. Qui ont rempli un rôle précieux d’accompagnement et de conseil. Ces mêmes personnes ont généralement déjà réalisé et réussi plusieurs appels d’offres auprès de services publics. Ils possèdent ainsi une expérience qui permet de mieux aborder ces étapes compliquées.
Glaze a ainsi évité de commettre une erreur que font la plupart des start-ups lorsqu’elles répondent à ce type d’appel. Nous avons adapté notre budget en fonction de la business unit à laquelle nous nous adressions. Beaucoup estiment qu’ils peuvent doubler ou tripler leur tarification parce qu’ils s’apprêtent à contracter avec un service public. Le fait est que vous serez probablement en face d’une unité dotée d’un budget réduit et qui ne vous suivra pas.
La réussite d’un marché public va-t-elle permettre à Glaze de s’attaquer à des marchés hors de France ?
L’international est dans notre ADN. Nous ne sommes jamais interdits de proposer nos services dans d’autres pays. C’est un point que nous avons en tête et pour lequel nous ne nous refusons pas d’agir. Ce que je comprends moins, c’est que l’on apprend très souvent dans les écoles de commerce qu’il faut tout d’abord maîtriser son propre marché national avant de s’attaquer à d’autres pays. La réalité est différente. Proposer ses solutions à l’étranger alors même que vous n’êtes qu’une start-up n’est pas incompatible, c’est même totalement réalisable.
BIO de Glaze
Glaze a été créée en 2015 par Mira Emmerling et Gwénaël Flatres d’une conviction forte : mettre l’expérience utilisateur et le parcours client au centre de son expertise. Elle propose, à l’attention des directions métiers, un outil simple permettant d’aligner les contenus aux intérêts des consommateurs. Editeur indépendant de logiciel, la société française a reçu en 2016 le label French Tech et l’AIMA via BPI France. Après avoir rejoint l’accélérateur de la région Ile de France Wilco (ex Scientipôle), Glaze a débuté la commercialisation de sa solution. Elle compte d’ores et déjà un portefeuille de grand comptes clients prestigieux tels que Pôle Emploi, la SNCF, Transilien, Schneider Electric, Engie, GRDF, Fnac Darty, C-Discount, Michelin ou encore Microsoft.
Olivier Robillart