L’événement Convergences numériques rassemble 7 candidats à l’élection présidentielle qui ont répondu à l’appel de nombreuses organisations professionnelles du numérique dont Numeum. Chacun a pu dévoiler son programme numérique et sa vision de la tech en France.
Nombre de candidats ont répondu aux organisations professionnelles, dont Numeum, afin d’aborder leur programme numérique. Chacun a bénéficié d’un temps imparti pour dévoiler sa vision du sujet pour les cinq années à venir. Entre souveraineté technologique et importance de la commande publique, les différents partis ont exprimé des visions propres d’un numérique apte à anticiper les enjeux de demain.
Valérie Pécresse (LR) : Pour une nouvelle souveraineté numérique
Première à endurer l’épreuve du pitch, Valérie Pécresse aborde plusieurs pans majeurs de sa stratégie numérique. Ces premiers mots sont clairs : « Nous devons nous poser la question du numérique en termes de souveraineté et développer avec vous un véritable plan de souveraineté« . La candidate estime ainsi qu’à l’heure actuelle le cloud n’est pas suffisamment « de confiance, ni stable« .
Face à cette problématique, il est ainsi nécessaire de disposer d’un « cloud de confiance souverain. Nous devons le bâtir brique par brique jusqu’à l’horizon 2030« . Cette logique souveraine se développerait également en termes lorsqu’une entreprise française va se faire racheter par une entité étrangère. Dans ce cadre un « haut conseil » disposerait d’une sorte de droit de regard sur cette acquisition.
Valérie Pécresse souhaite que la commande publique serve de tremplin au développement des technologies d’avenir. Elle explique : « Je veux que l’on utilise, la blockchain, la data et les technologies innovantes pour la commande publique. Mon objectif est ainsi que la moitié de cette commande soit dirigée vers des outils français et européens« .
Autre point majeur, afin de répondre aux besoins des entreprises en termes de recrutement, la candidate entend mieux détecter et former les talents de demain. « Nous allons avoir besoin d’un million de talents dans le numérique. Il va falloir détecter et former ces personnes, qui ne soient pas forcément masculins. Il faut donc commencer le codage dès la classe de 6ème et disposer d’un repérage dès la 2nde pour orienter les jeunes vers les filières numériques. Nous devons également reconvertir 50 000 fonctionnaires vers le numérique« , annonce-t-elle. Aussi, la responsable propose l’introduction d’un revenu jeune actif de 670 euros pendant 6 mois afin que tout étudiant se convertisse aux métiers du numérique.
Enfin, dernier point, Valérie Pécresse estime que l’Administration publique doit mieux venir en aide aux entrepreneurs. « Nous devons diviser par deux les démarches administratives, en travaillant en collaboration avec les branches professionnelles. La question de la performance publique doit être au cœur de nos attentes. De même, la digitalisation de la sphère publique va permettre de réaliser des économies substantielles« , ajoute la responsable.
Yannick Jadot (EELV) : Réconcilier l’innovation et l’intérêt général
Second à passer l’étape du pitch, Yannick Jadot entend accompagner l’innovation afin qu’elle puisse suivre l’intérêt général. « Mon projet n’est pas d’innover à votre place, ma responsabilité est de réconcilier le dynamisme et votre capacité d’innovation avec l’intérêt général. C’est la responsabilité qui doit m’incomber« , précise le responsable EELV.
La logique du responsable est donc de « garantir le foisonnement qui doit structurer le secteur. Vous êtes des acteurs de la société qui ont un rôle fort à jouer. Mais notre économie ne peut fonctionner à deux vitesses. C’est pourquoi il me semble important de définir un cadre dans lequel votre croissance permet le foisonnement démocratique« , explique-t-il.
Autre point majeur pour le candidat écologiste, la question de l’impact environnemental est central. Yannick Jadot précise : « Il faut penser aux impacts écologiques de la technologie dès leur déploiement. Il est possible d’avoir des technologies moins émettrices en énergie. Les datacenters par exemple doivent servir de réseau de chaleur pour d’autres bâtiments. Ils doivent générer des externalités positives« .
Dans une logique relativement proche de la candidate précédente, le représentant EELV préconise d’affranchir les entreprises « d’un certain nombre de paperasse inutile. Je veux mettre fin à la France Cerfa. La pandémie a représenté un levier de digitalisation de l’économie. Beaucoup de commerces se sont modernisés, il faut poursuivre ce mouvement en numérisant une bonne partie des documents papier. »
Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) : Ne plus créer de fracture numérique
Le candidat « Debout la France » souhaite qu’aucun Français ne souffre de fractures liées au numérique. C’est pourquoi il entend mettre fin aux zones blanches en termes d’accès aux réseaux de communication. « Le numérique permet un nouvel aménagement du territoire, il convient de mettre fin aux fractures et agir très rapidement« , ajoute-t-il. Nicolas Dupont-Aignan estime que les opérateurs de télécommunications n’interviennent pas suffisamment dans ces zones, ce qui crée une inégalité entre zones rurales et métropolitaines.
Son second défi concerne la souveraineté. Considéré comme « fondamental« , ce volet a vocation à faire en sorte que la France « ne soit pas une nation de seconde zone ou esclave des autres. Pour cela, nous devons être en mesure de monnayer nos données, d’avoir des moteurs de recherche français et européens, des administrations publiques qui protègent les données. Il convient donc de nationaliser le numérique. »
Nicolas Dupont-Aignan souhaite ainsi que de nouveaux géants du numérique soient édifiés, à l’image d’Ariane ou d’Airbus, en particulier en matière d’intelligence artificielle ou de supercalculateurs. Pour y parvenir, la candidat souhaite « investir dans la recherche et mieux payer nos chercheurs. Il faut rapatrier nos chercheurs et éviter que les plus jeunes aillent à l’étranger. Pour cela, j’augmenterai le budget de la recherche. Enfin, je ferai en sorte d’éviter qu’une jeune start-up soit rachetée par les entreprises étrangères. »
Enfin, avant que le gong de fin de pitch ne sonne, le responsable annonce qu’il prendra des mesures destinées à lutter contre l’obsolescence programmée.
Bastien Lachaud (LFI) : Le digital n’est pas réservé aux hommes
Présent pour représenter Jean-Luc Mélenchon, le député de Seine St Denis perçoit le numérique comme une nouvelle frontière à explorer au même titre que la mer (via les câbles sous-marins) ou l’Espace (via les satellites). Sur ce terrain, « la France doit être une grande puissance du numérique et être aux avant-postes. Nous avons les compétences industrielles et technologiques pour le faire. Il est de notre volonté de relever ces défis« , explique-t-il.
Là encore, ce défi relève de la souveraineté technologique. Il ajoute : « Nous devons avoir le contrôle des technologies au moyen de normes internationales solides. Il nous fait aussi mieux protéger nos données et résorber la fracture numérique pour protéger les personnes de la Bigbrotherisation de la société tout en garantissant la neutralité du Net« .
Autre point, LFI consacre son attention à la lutte pour l’environnement. L’Etat stratège doit alors mettre sur pied une « planification écologique capable de livrer des objectifs clairs et de mettre le numérique au service de la population. » L’idée est alors de débloquer un plan de 200 milliards d’euros destiner à « prendre des risques » et maintenir le dynamisme économique et industriel. « Il faut pour cela des normes écologiques et sociales, que les sociétés communiquent leur consommation énergétique. Ces normes s’imposeront alors aux autres« , ajoute-t-il.
Dernier sujet abordé, et non des moindres, la faible représentation des femmes dans l’écosystème numérique. Le représentant du candidat LFI insiste : « Le digital n’est pas réservé aux hommes. Il faut donc que le système éducatif n’organise pas cette ségrégation. Rien ne sera fait sans les femmes. L’enjeu réside donc dans le fait de redonner des moyens à l’Education nationale afin que l’ensemble des filières soient permises aux femmes. Ce ministère doit garantir cette égalité. »
Eric Zemmour (Reconquête!) : Pour une véritable souveraineté numérique française
Nouvellement présent au sein de la sphère politique française, Eric Zemmour reprend la thématique de la souveraineté numérique. Il explique : « Il me semble que tous n’ont pas encore compris l’entièreté des rapports de forces en termes de civilisation. La grande erreur de l’Europe a été de considérer que le numérique n’était qu’une histoire de consommateurs. D’autres, comme les Etats-Unis ou la Chine y ont vu un moyen d’assurer leur puissance. Ils y ont donc apposé un protectionnisme qui leur ont permis de bâtir des géants. Nous devons donc permettre d’avoir les moyens de disposer d’une véritable souveraineté numérique française. Il s’agit d’avoir un cloud français et d’imposer que les données les plus précieuses (régaliennes, militaires et relatives à la santé des personnes) soient présentes dans un cloud français. »
Second point majeur de son programme, le candidat du parti Reconquête! souhaite développer la compétitivité des entreprises au moyen d’un nouveau livret innovation permettant d’exonérer les jeunes pousses de certains impôts. Il poursuit : « Je propose également que les deux premières embauches, pendant 2 ans, soient exonérées de taxes. Aussi, je proposerai à tout employeur la capacité d’octroyer des primes de 1 à 3 mois de salaires totalement exonérés de charges sociales pour l’employé et son dirigeant.«
Concernant l’Education, le candidat dit ne pas « faire de la diversité une religion« . Il entend ainsi refaire de l’école un système d’excellence méritocratique en intégrant davantage d’Education au numérique à l’école et en créant « une dizaine d’écoles d’ingénieurs sur le modèle de l’école 42. »
Cédric O (LREM) : Massifier notre action pour les 5 prochaines années
Bien que l’annonce de son départ de la vie politique soit déjà faite, Cédric O a présenté le bilan du quinquennat ainsi que les prochaines lignes des années à venir. L’actuel Secrétaire d’Etat chargé du numérique entend « dans les 5 prochaines années, massifier ce que nous avons déjà effectué. Il va falloir dégager davantage d’investissements pour accompagner la croissance. Nous souhaitons ainsi créer un Nasdaq européen dans les 5 à 10 années qui viennent. Les fondateurs des licornes doivent avoir un intérêt à y être présent. »
A propos de la pénurie de talents, le représentant LREM insiste sur le fait que la qualité de l’écosystème est intrinsèquement lié à celui de la qualité des talents. « Il faut massifier très tôt« , précise-t-il. « Tous les collégiens doivent être formés au code. Nous voulons résoudre ce premier goulet d’étranglement qui se situe à l’école. »
Des propos interrogés par Benoît Darde, Administrateur de Numeum, qui a souhaité obtenir des précisions de la part du représentant du Gouvernement à propos de la stratégie en matière de cybersécurité. Sur le sujet, Cédric O estime que la France manque encore de talents. Elle doit donc encore massifier ses actions en matière des ressources alloués à ce domaine. Il ajoute : « Le Cybercampus doit aussi permettre de former davantage de personnes sur le sujet. A cela j’ajoute que la sensibilisation est clé. La majorité des attaques informatiques pourraient être évitées si les bons gestes barrières étaient connus de tous. »
Anne Hidalgo (PS) : La création de valeur ne doit pas se faire au détriment de l’humain
Dernière candidate à passer l’épreuve du pitch, la maire de Paris met en avant le besoin d’investissement pour accompagner la croissance du secteur. Autre point, la formation des plus jeunes est, selon elle, la clé du développement de la tech en France. « La formation permet de voir arriver de nouveaux jeunes créateurs. En gèrant mieux le plan de relance européen, nous disposerons de 5 milliards d’euros destinés à la formation à développer les infrastructures permettant de désenclaver les territoires, » ajoute-t-elle.
La candidate insiste également sur la souveraineté numérique. Elle précise : « La maîtrise de nos données et de notre souveraineté sont majeures. Aussi, le numérique et son inventivité doivent se faire dans le sens de l’amélioration de nos conditions de vie. J’entends donc développer un secteur numérique français et européen dans lequel nous pourront insérer notre propre modèle de développement spécifique alliant responsabilité sociale, économique et environnementale. »
Enfin, Anne Hidalgo souhaite développer 4 odyssées autour des sujets majeurs qu’elle porte. Ces derniers recoupent la présence des femmes, la Santé, les énergies renouvelables ainsi que la mobilité. « Nous nous engageons à porter ces odyssées sur tous les territoires« , explique-t-elle.
Olivier Robillart