Pour sa 4ème édition, Numeum réunit experts et professionnels de l’intelligence artificielle. L’AI France Summit est l’occasion d’aborder les impacts de l’IA, en particulier générative, et de LLM pour les entreprises du numérique.
Pas moins de 300 personnes sur l’ensemble de la journée se sont rendues présentes lors de l’AI France Summit. L’événement, organisé par Numeum, a pour mission de rassembler experts et entreprises qui développent ou utilisent l’intelligence artificielle. Le constat dressé collectivement est particulièrement captivant. Les IA génératives ou les LLM sont de plus en plus utilisées par les entreprises du numérique ou en voie de transformation.
Dans l’optique de mettre en avant l’excellence française en intelligence artificielle, les responsables présents confirment que la technologie permet de nourrir la compétitivité des entreprises. Véronique Torner, présidente de Numeum explique : « l’IA se présente comme une technologie transverse qui aura des impacts sur l’ensemble de notre vie. La stratégie nationale doit se poursuivre pour appréhender les changements induits par l’IA. Les récentes annonces formulées par Emmanuel Macron ont montré que des investissements étaient nécessaires pour sauvegarder la compétitivité de la France et répondre aux exigences affichées. »
La responsable de l’organisation représentative des entreprises du numérique poursuit : « Numeum fait le lien entre l’écosystème numérique et la société. Nous soutenons les initiatives qui apportent la confiance exigée sans pour autant freiner l’innovation. Il convient à présent d’aller plus loin et étendre l’apprentissage des IA à des métiers dont nous aurons besoin demain. Numeum se mobilise au travers de nombreuses initiatives comme Ethical AI, sur le sujet des compétences via l’OPIIEC. Nous sommes également copilotes de la RefCo IA portée par le Hub France IA sur les métiers et compétences d’avenir. L’objectif est de présenter un référentiel sur les compétences nécessaires pour travailler dans le domaine dans les prochaines années. Il s’agit donc d’accompagner la transformation des métiers en entreprise grâce à une collectif de partenaires.«
Quelle stratégie pour développer l’IA
L’objectif est donc de nourrir l’innovation autour de la technologie. C’est pourquoi certaines réglementations comme l’AI Act ne doivent pas brider cette dernière. Thibault de Tersant, Vice-Président de Numeum, précise : « Nous souhaitons revenir à l’orientation du premier de AI Act. Il ne doit pas revenir aux entreprises d’imaginer l’usage de l’IA le plus déviant possible. Nous ne pouvons pas nous mettre à la place du client. A propos des jeux de données, il faut assurer une traçabilité de ces dernières. Enfin, la documentation demeure un point capital. Un éditeur de logiciel peut avoir à délivrer un certain nombre d’éléments de manière ouverte. Ce point peut s’avérer critique dans la mesure où certaines informations sortiront de son périmètre. »
Le responsable ajoute : « La question de l’intégrité des jeux de données est centrale. Il existe actuellement une problématique autour de la protection des secrets d’affaires. De nombreuses entreprises livrent une partie de leurs informations clés aux IA génératives. Nous ne sommes donc pas opposés à la règlementation mais il est important de porter une attention particulière à ces éléments clés. »
Des propos relayés par Guillaume Avrin, Coordinateur National pour l’Intelligence Artificielle auprès de la DGE. Le responsable insiste sur le fait que la mission de la direction est de diffuser IA dans l’économie- et donc de ne pas brider l’innovation. Le responsable précise : « la réglementation autour de l’IA concerne surtout la question des fonctionnalités automatisées. »
Quels usages et impacts pour les IA génératives ?
Il est désormais impossible de passer à côté de la révolution générée par des outils comme ChatGPT ou MidJourney. Ces IA génératives, au cœur de l’AI France Summit, se développent de manière généralisée. Françoise Soulié, Conseillère Scientifique au Hub France IA confie : « Depuis 2017, on a vu apparaitre une nouvelle forme d’IA produisant des contenus. Il s’agit de super-fakes capables d’agir sur les images, le son ou sur des textes générés par des algorithmes. La technologie est encore peu mature mais se développe fortement. Les usages se répandent dans tous les domaines.«
Elle ajoute : « Mais les fonctions qui représente 75 % de IA générative à ce jour concernent les secteurs de la vente, du marketing, du software, de la relation client et de la R&D. En somme, l’IA ne va pas remplacer les humains. Elle va réduire la demande pour certains emplois et en créer sur de nouvelles professions. Le point d’avenir concerne donc la formation des collaborateurs. »
Une levier stratégique ?
En somme, peut-on considérer l’Intelligence artificielle générative comme levier stratégique de productivité ? Pour Bassem Asseh, Head of Sales de l’entreprise Hugging Face, ces IA permettent de limiter les coûts et de les optimiser pour entrainer des modèles. Et cela, sur une infrastructure déjà installée.
De son côté, Philippe Limantour, directeur technologique et cybersécurité de Microsoft confirme : « la machine s’adapte a beaucoup de choses. Nous nous trouvons devant une formidable opportunité dont il ne faut pas avoir peur. Il convient, au contraire, d’apprendre à l’utiliser et apprivoiser cette nouvelle technologie. Son principal avantage est de masquer la complexité et donc de reprendre le pouvoir sur la machine.«
Autre exemple, Salesforce indique que son outil Einstein GTPT Trust layer sert de surcouche permettant de sécuriser et contrôler les demandes des utilisateurs. Certains points vont s’afficher en rouge, ces derniers sont alors considérés comme critiques, ne devant pas être communiqués à ChatGPT (noms des prospects par exemple…).
AI France Summit : opérationnaliser l’éthique en IA
Si l’innovation est clé, il convient d’adresser les problématiques légales et éthiques. En effet, « l’utilisation des IA génératives représente un certain nombre de risques comme les biais, la désinformation ou les décisions non adaptées. Autre point, la divulgation d’informations confidentielles ou les vulnérabilités de sécurité existent. En parallèle, les questions relatives à la propriété intellectuelle sont clé. Il faut aussi mettre en place une gouvernance dans l’entreprise pour disposer des règles éthiques« , témoigne Grégory Abisror, Managing Director Artificial Intelligence Lead d’Accenture.
Toutefois, ces garde-fous peuvent avoir des conséquences importantes. Roxane Adle, Head of Digital Society Research d’Orange précise : « une IA totalement éthique pourrait ne pas être performante et toutes les informations sont objectivement biaisées. Il s’agit donc de mettre des points de contrôle pour vérifier à chaque étape que le résultat donné n’est pas biaisé. »
De son côté, Cédric Fayet, CTO de Pocket Result, ajoute : « le point essentiel est de faire comprendre aux clients comment fonctionne l’IA. Et de faire comprendre que cela dépend d’un algorithme. Il n’y a pas de magie car cela dépend des données et de la conception de ces dernières. Le système n’est ni bon ni mauvais, mais les expérimentateurs portent leur biais, sans forcement avoir des velléités néfastes mais des écueils surviennent. Il faut les éviter.«
L’idée est donc d’inscrire des outils d’IA générative et de LLM dans le cadre d’une technologie de confiance. Katya Lainé, Administratrice, Présidente de la Commission IA de Numeum, explique : « Nous avons atterri sur un guide pratique portant sur la manière de fabriquer l’IA éthique. A ce jour, il manque des outils pratiques pour permettre à l’IA d’être utilisée au sein des entreprises. L’objectif étant de fédérer autour de cet outil. »
« Le livrable reprend des recommandations concrètes pour aller vers plus d’éthiques et engager les entreprises à se diriger vers une démarche. Il s’agit donc d’un outil qui englobe de nouvelles notions, les évolutions règlementaires, la notion d’IA frugale… Chacun disposera d’un outil avec des cas d’usages au sein de différents secteurs d’activité« , ajoute Atef ben Othman, Délégué aux usages numériques IA de Numeum.
Vers la formation et au-delà
Afin de nourrir l’innovation, la formation de nouveaux talents demeure capitale. Et cela au sein même des écoles. Benoit Bergeret, Directeur exécutif du Metalab (ESSEC Business School) explique : « le code python est appris par nos étudiants. Nous avons compris que l’IA a un potentiel de transformation de la société. Il s’agit de traitements automatisés qui auront un impact conséquent sur notre société. »
De son côté, Joachim Massias, Directeur Pédagogique du MBA en IA (Institut Léonard de Vinci) précise : « nous formons les managers aux sujets relatifs à l’IA, au Deep Learning, au management spécifique des projets d’IA. Le challenge en matière d’IA générative et d’être en mesure de présenter des professeurs capables d’enseigner cette matière. »
Des propos repris par Didier Gaultier, Directeur DataScience & Ethics IA (Université Data&Science – Business&Décision) au sein d’Orange Business Services. Le responsable explique : « En tant qu’ESN, nous avons le devoir de faire fonctionner un projet auprès de nos clients. Dans cette optique, nos difficultés concernent toujours le recrutement. Nous nous sommes rendus compte que les personnes très qualifiées disposaient d’un bagage théorique conséquent mais peu de bagage pratique. C’est pourquoi nous avons crée notre propre école au sein d’un cursus post-master. Nous formons à présent des collaborateurs à l’extérieur d’OBS comme chez Sanofi ou auprès du groupe BPCE. »
Olivier Robillart